Combien
de fois par jour guettes-tu l’heure ?
Depuis que tu sais
« lire » une montre,
combien de fois l’as-tu
fait ?
Un nombre incommensurable !
Ta peur
atavique de rater le temps
comme tu raterais un train,
comme
si tu pouvais manquer celui-là
dont toujours entre en gare le
prochain !
Tu te presses à la parade duodécimale
faire
le tour du cadran,
ne perds pas une miette du défilé des
trottantes :
ces semeuses en rond des mêmes cailloux
blancs
déjà échelonnés au cycle précédent :
une
ronde de lunes enchaînées,
tenues à l’œil massif de leur
gardienne,
saisons après saisons qui se promènent
à sens
unique dans la cour orbitale,
le long du mur étanche de la
gravité.
Ô tu raffoles du manège à contretemps perdu
d’avance,
l’écouter grincer ton quotidien
à
intervalles qui scandent qui balisent chaque tournant de ta vie.
Mais
n’est-il pas temps aujourd’hui
de te tourner la tête à un
autre rythme ?
D’évincer la despote heure martiale
et
passer à l’heure congénitale ?
De laisser les montres
s’éteindre, se vider de leur temps,
puis au bout des
aiguilles recueillir tout ce sang
pour perfuser ton cœur et
serrer son ressort,
avant qu’il soit trop lâche ?
Tu
ne voudrais quand même pas,
faute de l’avoir remonté,
parce
que ça t’est sorti de la tête,
que ton vieux cœur
s’arrête ?
Ne plus sentir l’oscillation faire grimper
ton compte-jours ?
Perdre le fil de ton compte à
rebours ?
Et, privé d’à présent, craindre d’être en
retard
et te précipiter et arriver trop tôt
à ton
dernier rendez-vous ?
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