2015-07-16

"Feu départ…"


La saison s’annonce de t’élancer
pour une ultime traversée.
Déjà tu lorgnes depuis le pont, seul,
par chaque trou de ton linceul,
sur l’archipel lointain des souvenirs
rescapés : l’unique avenir
auquel tu puisses encore t’accrocher,
peuplé d’ombres effilochées.

Tandis qu’approche le bref aujourd’hui
t’amenant au bout de la nuit
où nul demain ne trouera l’horizon,
se disperse ta cargaison
de frais trésors à placer sur la carte,
comme autant d’obscures pancartes
dont hier à peine tu suivais la voie
en reliant leurs points de croix.

Bientôt verrons flotter ceux sur le quai
attendant leur tour d’embarquer,
lorsque tu leur auras tourné le dos
– tes os blancs sur un noir drapeau !

2015-07-03

"Le temps mord…"


Il n’est pas liquide
mais tu as peur de le perdre,
comme une réserve d’oxygène
comprimée, prête à fuir
quelle bouteille assez étanche
emmagasinant l’air du temps
à respirer à échéance.

Il n’est pas enjeu
mais tu cherches à le gagner,
comme de l’argent à long terme
épargné, prêt à rendre
quels intérêts assez rentables
enflant une somme d’instants
à dépenser à l’avenir.

Il n’a pas d’issue
mais tu cours après sa mort,
comme après le point final
annoncé, prêt à clore
quel agenda assez épais
prenant à la dernière page
le plus ultime rendez-vous.

Tu crois le tenir en laisse
tandis qu’il trotte à la longe en se laissant faire
au fond d’étroits manèges sous verre.
Et tu voudrais bien remonter
le mouvement perpétuel de son balancier fatal
sans fin repoussé à tour de rôle
entre les deux pôles d’un nouveau paradoxe.
Mais chaque aller-retour te convoque et dépense et respire,
et te berce de son illusion.

Le temps est un troupeau sauvage
qui n’en finit pas de migrer :
sans jamais souffler, interminable, il passe
– et ses sabots te piétinent !
Sur l’immense plaine devant lui,
seuls des brins d’herbe qui dépassent,
que broutera bientôt la harde,
sans même infléchir sa course
– jusqu’à la racine !